Nous entamions il y a quelques jours notre saison des festivals avec le BockSons de Valentigney (25). Premier concert / premiĂšre claque avec les locaux de l’Ă©tape EACH qui y ouvraient les hostilitĂ©s. Un set aux influences stoner / psych marquĂ©es mais qui laisse deviner l’envie d’en dĂ©coudre sous des horizons plus vastes que cela. Nul doute que le quatuor s’apprĂȘte Ă tabasser quelques scĂšnes et quelques tympans dans les annĂ©es Ă venir. C’est donc tout sonnĂ© que nous sommes allĂ©s Ă leur rencontre juste aprĂšs leur concert, histoire de graver dans le marbre les premiers Ă©lĂ©ments biographiques de EACH. Un blaze qui nous a inspirĂ© un interrockatoire anaphorique ascendant Portrait Chinois « CHAQUE groupe ».
Chaque groupe a un mythe fondateur, quel est le vĂŽtre?
Thibaut (batterie): y en a plein! Lucile et moi on est cousins, on avait un groupe de reprises ensemble oĂč on jouait des trucs des annĂ©es 90/2000 comme The Vines ou The Hives. François et moi on a jouĂ© dans un groupe de stoner oĂč je remplaçais le batteur qui s’Ă©tait barrĂ©. Et Maxime et moi on se connait depuis gamins, nos pĂšres jouaient aussi de la musique ensemble dans un groupe de reprises. On a créé Each les trois et avec Pierre, guitariste qui ne joue plus maintenant avec nous, et qui est aussi le frĂšre de François.
Max (guitare): et François et moi, on se connaĂźt depuis l’Ă©cole et on s’est toujours dit qu’on ferait de la musique ensemble. Donc si on veut synthĂ©tiser, c’est amitiĂ©s et famille avant tout.
François (basse): et aussi, les gars sĂ»rs (rires). Les personnes dans le groupe ont dĂ©jĂ toutes un lien fort. C’est le ciment du groupe.
Thibaut: quand on Ă©tait les quatre au dĂ©but, on s’est vite dit « il nous faut du chant » mais trouver un chanteur dans le coin, ce n’est pas si facile. Comme je jouais depuis des annĂ©es avec Lucile, j’ai dit « venez, on essaie avec elle ». Elle est arrivĂ©e et elle a cassĂ© des gueules (rires).
Lucile (chant): je me rappelle qu’au dĂ©but ils me disaient « c’est du stoner, on cherche un chanteur avec une grosse voix grave » … bon, au final, y a un peu moins de testostĂ©rone mais ça le fait (rires).
Chaque groupe a des influences …
Thibaut: on se retrouve sur certains groupes mais on a tous des choses qui nous influencent plus particuliĂšrement. Max c’est Slift, François c’est Fu Manchu, Lucile PJ Harvey ou Paramore et moi 1000MODS, Frank Carter ou QOTSA.
Max: au final, on est au crossover de plein d’influences et c’est pour ça qu’on ne fait pas vraiment que du stoner. On ne cherche pas Ă s’inscrire dans un truc bien prĂ©cis. On fait du rock!

Chaque groupe a un poison favori …
Thibaut: faut rĂ©pondre honnĂȘtement (rires)? La biĂšre, on va dire la biĂšre.
François: et la ganja aussi, pour coller Ă l’Ă©tiquette stoner. Il en faut un dans le groupe pour cocher la case.
Lucile: les clopes, les Kinder Bueno et les pastilles eucalyptus pour la voix … pour annuler l’effet des clopes.
Si chaque groupe a un talon d’Achille, quel est le vĂŽtre?
Thibaut: la fatigue! Quand y en a un qui arrive fatiguĂ© en rĂ©pet, ça te flingue le truc. On est une famille mais on n’est souvent pas loin de s’insulter. Typiquement, la derniĂšre rĂ©pet avant le concert, c’Ă©tait nul, j’Ă©tais nul, vous me cassiez tous les couilles (rires). Tu peux pas toujours avoir l’osmose. Pis, en fait, tu montes sur scĂšnes, tu casses tout. Donc la fatigue … et la biĂšre aussi (rires).
Est-ce que, comme chaque groupe, vous avez une anecdote de concert honteuse?
Thibaut: ça nous est tous arrivĂ©s de faire un concert un peu rond. Pour l’anniversaire d’un pote de The Maniax, on devait jouer Ă minuit donc, en attendant, on a bu des biĂšres et du punch. Lucile nous a rejoint tranquillement aprĂšs son cinĂ© mais de nous trois, personne ne se souvient d’avoir jouĂ© (rires).
Max: pour l’instant, c’est notre anecdote numĂ©ro 1, on n’a jamais aussi mal jouĂ© que ce soir lĂ .
François: mais c’Ă©tait pour un Ă©vĂ©nement privĂ©, personne n’avait payĂ© sa place, ça va (rires).
Un plaisir coupable?
Max: moi c’est Delpech, j’adore.
François: c’est pas vraiment coupable parce que je ne m’en cache pas mais j’aime bien tout ce qui est rap français, avec des voix bien vocodĂ©es, genre PNL.
Thibaut: le morceau Macumba.
Lucile: c’est dur, il y en a beaucoup. Je pourrais vous montrer ma playlist Spotify de la honte: du Aya Nakamura, du Lady Gaga, des tubes R’n’B des annĂ©es 2000 genre Usher. Des trucs sombres (rires). Mais en vrai, on appelle ça des plaisirs coupables alors qu’il y a des trucs super bien foutus. T’as un peu ce mythe de la pop et de la musique populaire pour les gueux alors que les vrais rockers, eux, Ă©coutent de la poĂ©sie. Bah, pas forcĂ©ment.

Une idĂ©e en tĂȘte pour devenir mainstream?
François: non, du tout. J’ai l’impression que si on le devenait un jour, ça serait sans forcer et que ça serait venu naturellement, sans que ça soit un plan de carriĂšre.
Thibaut: l’envie c’est de rester rock’n’roll. Mais pour devenir mainstream, faudrait dĂ©jĂ qu’on arrĂȘte de se faire chier avec les compos et qu’on ne dĂ©passe pas les trois accords.
Est-ce que, comme chaque groupe, vous avez déjà votre stalker?
Max: on n’a pas encore la notoriĂ©tĂ© pour ça. On a quelques fans bourrĂ©s Ă la fin des concerts mais on se met Ă leur place, on est passĂ©s par lĂ aussi.
Thibaut: pour l’instant on est plus un groupe de 1Ăšre partie, les gens ne sont pas assez bourrĂ©s. On les Ă©chauffe et ensuite ils cassent les couilles Ă d’autres groupes (rires).
Chaque groupe a une cause Ă dĂ©fendre, c’est quoi la vĂŽtre?
Lucile: dans les paroles Ă©crites pour l’instant, je traite plutĂŽt de choses personnelles mĂȘme si dans ma vie perso, il y a plein de sujets qui me tiennent Ă cĆur. Ăa pourrait Ă©voluer mais je n’ai pas forcĂ©ment envie d’aller dans le revendicatif pur et dur Ă la Tagada Jones par exemple. Dans mes textes, j’essaie de laisser un peu de marge de manĆuvre Ă l’interprĂ©tation et de ne pas ĂȘtre dans la dĂ©nonciation frontale.
Max: et puis, on est plus tournés stoner / psyché, il faut que ça soit cohérent avec le style aussi, on ne fait pas du punk rock.
Chaque groupe a envie de composer une bande originale, vous, ça serait pour quel(s) film(s)?
Thibaut: Trainspotting.
François: Godzila (rires). Ăa pourrait ĂȘtre cool en tout cas, c’est une autre vision et maniĂšre de composer.
Max: je verrais bien un western, un peu comme l’a fait King Gizzard sur son deuxiĂšme album.
Lucile: ou Virgin Suicides.

Chaque groupe a un ennemi jurĂ© …
Lucile: pas d’ennemis humains en tout cas. On ne s’est encore jamais fritĂ©s avec un autre groupe ou une orga.
Thibaut: le tempo peut-ĂȘtre mais on l’a domptĂ©. C’Ă©tait un ennemi mais ça va mieux maintenant. Alors, on va dire la biĂšre!
Chaque groupe se sépare pour une raison, ça sera quoi pour vous?
Thibaut: la biĂšre encore (rires)! Non, peut-ĂȘtre un choix de vie. Si l’un de nous se dit « j’ai plus envie de jouer de la musique, je vais Ă©lever des chĂšvres dans le Larzac » et ben vas-y, feu. On ne se sĂ©parerait pas pour autant, on trouverait sĂ»rement un remplaçant et c’est reparti. Ăa vaut pour moi et pour chacun. Y a plein de groupes oĂč ils cassent les couilles, se barrent et rĂ©clament leurs droits. J’espĂšre qu’on ne sera pas comme ça.
Max: typiquement quand Pierre, notre guitariste, est parti, ça s’est passĂ© sans animositĂ©. Juste avant de quitter le groupe, il avait achetĂ© une nouvelle guitare dont il m’a fait cadeau parce qu’il ne voulait plus en jouer. On comprend ces dĂ©cisions-lĂ . Il y a plus de la tristesse que d’animositĂ©.
Est-ce que, comme chaque groupe, vous visez un but ultime?
François: le Graal, ça serait de pouvoir vivre de la musique. Partir en tournĂ©e tout le temps, voyager, rencontrer du monde … Que notre passion devienne mĂ©tier.
Et enfin, est-ce que, comme chaque groupe, vous avez des projets sur le feu?
Thibaut: on va enregistrer cet Ă©tĂ© notre premier EP; nos premiers 4 titres depuis nos dĂ©buts en 2022. On le sortira dĂ©but 2025 et on enchaĂźnera sur une vingtaine ou trentaine de dates pour sortir un putain d’album Ă la suite. Ă la fin de chaque concert, les gens viennent nous voir sur le merch pour nous demander des Cds ou des vinyles et tout ce qu’on a Ă leur proposer, c’est des planchettes apĂ©ros au nom du groupe (rires). Et mĂȘme si elles sont grave cools maintenant ce qu’on veut c’est de pouvoir proposer notre skeud.
Lucile: ça sera nos premiers vrais enregistrements qu’on va pouvoir envoyer aux programmateurs et aux festivals. Qu’on puisse rentrer dans le game!

Tu l’auras pigĂ©, EACH s’apprĂȘte Ă tout fracasser. Pour ne rien louper de la dĂ©flagration Ă venir, l’actu du groupe, c’est ici.
Et pour te prendre ta dose de psych-fuzz-chroniques, l’actu des Interrockations, ça se passe ici. Abonne-toi.
Photos par Dorine Maillot.
Photo de couverture par Stéphanie Durbic.

Laisser un commentaire