19 – Satan écoute-t-il du Mariah Carey à Noël ?

Joyeuses fêtes à vous les petits Ozzys à bonnets rouges ! En espérant que la hotte du Père Noël vous ait été ces jours-ci aussi remplie que le tarin du Prince des Ténèbres dans les années 80 !

Permettez-nous donc de vous glisser un petit interrockadeau surprise sous le sapin !

Un petit Top 10 artisanal comme il se doit habituellement en fin d’année ? Un réchauffé de notre masterclass sur les secrets de fabrication d’un Top Album Ultime ? Un condensé des grosse sorties rock de ces derniers mois (Amyl and The Sniffers, IDLES, Tramhaus, Meatbodies, Fat White Family parmi les meilleures) ? Une ode en alexandrins à la gloire de Fat Dog, de loin la révélation la plus folle de 2024 ?

Rien de tout cela !

Vous trouverez ici la restitution de nos travaux hivernaux menés sur les réseaux, notre épopée rockologique humblement intitulée : le Rockalendrier de l’Avent.

Du 1er au 24 décembre, nous avons partagé sur les internets 24 de nos coups de cœur du millésime en cours. 24 groupes made in France qui ont marqué l’année de leur empreinte. De la friandises rock’n’rollesque pour tous les goûts : stoner, punk, pop, hard, kraut, grunge, psyché, métal ; chaque jour, une pépite, une trouvaille, un banger !

Alors, Satan écoute-t-il du Mariah Carey à Noël ? Nous l’ignorons. Mais il serait bien aise de découvrir la playlist regroupant toutes ces petites merveilles. Elle se trouve ci-dessous et nos chroniques également. Bonne écoute, bonne lecture, support your local bands et follow Les Interrockations !

Karkara – All is Dust

Un opéra psych-stoner dystopique. Le side-project fantasmé du guitariste punko-pyromane de Fury Road. L’hypnotique bande-son de l’effondrement à venir. All is Dust, troisième opus des toulousains de Karkara, est un peu tout ça à la fois. Paru en mars, nous tenions là notre première claque cosmique de 2024 … guère égalée depuis.

Manşūr – Seul Parmi Les Autres

Derrière l’artwork sublime qui lui sert d’écrin, Seul Parmi Les Autres, premier EP posant les fondations du cigale-core. Un métal naviguant entre préfixes (neo/post/alternative) et où ne plane jamais bien loin l’ombre tutélaire de Deftones. 5 titres entre contrées éthérées et cieux orageux, émanant des profondeurs provençales. En espérant que le voyage ne fasse que commencer.

FONCEDALLE – FONCEDALLE

Tu la connais cette irrépressible fringale qui s’empare de toi après un bon gros splif des familles ? Et bien FONCEDALLE en a composé la version sonore. LA bande-son pour se goinfrer les esgourdes en temps de montées cannabinoïdes. Un subtil mélange d’instrus rock et de beats électroniques, un trip nébuleux entre kraut allemand et grooves Madchester, une hypnotique cavalcade direction la musique du tur-fu. Alors, tu connais le refrain, passe passe le oinj !

Askemåne – Gravitasjon

Avec son premier album Gravitasjon, Askemåne s’ouvre les portes du Valhalla. 11 titres de néo-dark folk de haute-volée qui posent le quatuor franc-comtois en dignes disciples de Wardruna et Heilung. Incantations, chants de gorge et ambiances chamaniques, vous tenez là la soundtrack de vos prochaines cérémonies païennes.

Dalle Béton – Nos Plus Belles Chansons

Un groupe qui aura fait couler autant d’encre qu’il n’aura fait couler de béton sur scène (littéralement). Parti en retraite anticipé en cette fin d’année, le quatuor breton aura eu le temps de nous livrer en guise de cadeau d’adieu ce premier, unique et dernier album. Véritable condensé de bangers krautrocky post-punk, Nos Plus Belles Chansons c’est avant tout un regard quasi sociologique sur notre société (Les aléas du vin nat / Doudoune Sans Manche / Mange ton Compost) et une analyse sans concession de notre paysage politique (49-3), le tout livré au 1000ème degré. Des hymnes qui résisteront à travers les siècles, aussi inébranlables qu’une terrasse solidement cimentée.

Down to the Wire – Deep in Denial

La vengeance est un plat qui se mange froid. Dénigrée pendant des années par les rockologues de salon, la période fin 90’s / début 2000 tient enfin sa revanche. Les enfants illégitimes du grunge et du néo-métal prennent désormais les commandes et s’apprêtent à fracasser la scène rock française façon guitare de Kurt Cobain en fin de concert. Down to the Wire s’en vient prendre part aux émeutes et balance là un sacré pavé avec Deep in Denial. 10 titres pour ressusciter la rage de leurs aînés et la conjuguer effrontément au présent. 10 titres pour incarner la soundtrack de cette seconde vague. Bruts. Imparables. Sur le fil.

Sarmates – Sarmates

Rouen, capitale du rock ? L’affaire, ces dernières années, n’est plus à prouver. De ce vivier à pépites (Servo, We Hate You Please Die, MNNQNS, Dirty Cloud …), émerge aujourd’hui Sarmates, nobles représentants du Métal ethnique. Un heavy metallicqueux couplé à un véritable tour du monde musical. Guimbarde, saz (luth turc), chants de gorge des steppes mongoliennes, le tout chanté en plusieurs langues (perse, russe, iranien, dialecte mongol, anglais). La synergie entre sonorités orientales et métal fonctionne ici à merveille. Le choc des civilisations, c’est oui !

Mazingo – Hey You

Les poches crevées, l’auberge à la Grande Ourse, le frou-frou des étoiles et tutti quanti ; vous connaissez le poème. Il y a un peu de la bohème rimbaldienne dans la musique de Mazingo et leur second album Hey You. Le power trio nous guide ici dans un vagabondage bluesy où se marient contrebasse, harmonica et banjo et où se croisent les incantations voodoos de Dr John et la plume éthylique de Tom Waits. Ces hobos musiciens ont le blues ensoleillé et les routes sur lesquelles ils nous mènent ne connaissent que la chaleur des journées californiennes et celle des âmes de Louisiane. Se dégage de ce road trip sonore une furieuse envie de tendre le pouce et de prendre le large.

MADAMThanks for the Noise

12 titres imparables. All Killer No Filler comme disait l’autre. Des hymnes instantanés aussi dansants que rageurs. Une énergie rock’n’rollesque aussi pure qu’inarrêtable. Le tout décuplé sur scène. Le trio toulousain signe pour son premier album un impressionnant sans-faute. Merci pour ce bruit.

HORSKH – Body

Au croisement du metal, de l’EBM et de l’indus. Au rendez-vous de la violence. Le trio bisontin signe pour son 3ème album une nouvelle déflagration qui risque, une fois encore, de laisser plus d’un auditeur sur le carreau. Entre le déchaînement inaugural de Tension et l’obscurité crépusculaire de It Spreads, un océan noir de suffocations où rares se font les accalmies. Avec ses onze nouveaux titres, HORSKH nous prouve assurément que, si l’amour dure trois ans, la haine, elle, dure trente minutes.

Barrio Colette – Midi Soir Matin

Notre addiction de 2023, vous le savez peut-être, se nommait Barrio Colette. Le groupe helvète avait alors hanté à peu près toutes nos rubriques de l’année, de nos interviews à nos Top Albums et leur premier opus Rouge Rose avait squatté inlassablement nos platines. Et alors que nous étions encore là à nous prélasser de chaque accord de cette petite pépite, nous avons eu, il y a quelques jours, la très heureuse surprise d’en découvrir la succession. 4 nouveaux titres, inopinés, pour prolonger le charme initial. Toujours cette même pop grungy ensoleillée, cette insolente désinvolture, ces mini-hymnes pour road movies fantasmés. Avec en clôture une réappropriation du mythique These Boots Are Made For Walkin’ dans une version barrio-colettisée du plus bel effet. Ces bottes là, rouges et roses, marchent dans les pas des plus grands. Midi Soir Matin n’en est qu’une nouvelle démonstration … jusqu’à la prochaine.

Télépagaille – Traction

Le quintet parisien nous offre cette année Traction, son deuxième EP, paru sur le label Le Cèpe Records ; gage de qualidad s’il en est. Un rock foutraque, festif, sauvage taillé pour la bamboche. Talking Heads qui auraient bouffé les Rita Mitsouko. Ou l’inverse peut-être. Un phrasé plus rap que rock, dégainé dans la langue de Jacno et des titres, mes amis, des titres ! Docteur, Boite de conserve, Monsieur l’Agent, Distributeur. Des odes au quotidien et au néant aussi punks que du Georges Perec. Le flow est inarrêtable, les rythmiques intraitables. Alors, prêts à foutre la (télé)pagaille ?

Les Vulves Assassines – Les Champignons

Ok, les Vulves Assassines n’ont sorti ni album ni EP cette année. Mais rien que pour ce titre sorti cet été contre l’extrême-droite, véritable crotte de nez lancée au visage des Bardella, Le Pen et autres Retailleau, leur place dans ce rockalendrier est amplement méritée ! Car, don’t forget ; l’électro-punk marxiste féministe sera le genre humain !

Kokopeli – Family Affair

Family Affair, en voilà un EP qu’on ne saurait accuser de publicité mensongère ! Derrière Kokopeli, Carla et Julie, deux cousines qui après avoir enflammé les repas de famille, ont décidé de porter l’affaire au niveau supérieur en offrant au monde ces cinq titres éblouissants. Une indie pop ensoleillée, rêveuse, où mélodies et harmonies rivalisent d’enivrement et où l’on croit parfois apercevoir la mélancolie californienne des Growlers ou des Allah-Las. 17 minutes pour une odyssée intime, hors du temps. La caution douceur de notre Rockalendrier de l’Avent.

Catchy Peril – Disco Sucks

Marseille, carrefour des cultures. L’histoire l’a prouvé et le prouve à nouveau à travers ce Disco Sucks au croisement des influences. Le quatuor phocéen convoque pour son premier EP des références aussi variées que Devo, Boney M, Kap Bambino ou bien encore Fat White Family. Glam, disco, psyché, post-punk se retrouvent réunis sur un dancefloor des plus schlagos pour une des bamboches à paillettes les plus réjouissantes de 2024. Il se dégage de l’ensemble une puissance tubesque imparable qui nous laisse exsangues, extatiques et fiévreux d’impatience pour la suite. Disco Sucks peut-être mais Catchy Peril rules pour sûr.

Deadly Shakes – Fields of Gold

Derrière la pyramide ornant Fields of Gold ne se cache peut-être pas l’or des incas mais néanmoins un véritable travail d’orfèvre. Un trio d’artisans œuvrant dans un heavy blues ayant pour divinités Led Zep, Deep Purple ou leurs rejetons contemporains Wolfmother , Rival Sons. Sur cette première sortie, les mulhousiens de Deadly Shakes délivrent six titres puissants aux riffs chevelus (What You Gotta Say), aux solos chamaniques (Something Insane) et parfois même aux incursions funky (Evil Charmer). Il y a là-dedans assez d’énergie pour fracasser toutes les fosses de France et du Nouveau Monde et quelques refrains qui resteront gravés dans les têtes aussi éternellement que des runes dans la roche des pyramides. Un Eldorado sonique à portée d’esgourdes !

Dynamite Shakers – Don’t Be Boring

Avec un blaze pareil, on s’en doute, les Dynamite Shakers n’officient pas dans le trip hop lo-fi. Portant en étendard des références aussi élégantes que les Cramps, le Gun Club ou les Fleshtones, le jeune quatuor vendéen jure allégeance à un rock’n’roll garage pur jus, quatre étoiles, AOP ou tout autre label qualité qu’il vous siéra. Rien de nouveau sous le soleil ici mais un dévouement à la cause total et authentique. L’album se nomme Don’t Be Boring et, assurément, ne l’est jamais. Tout y est dégainé à toute berzingue, avec une assurance folle. On y esquive les poncifs passéistes comme on s’y permet des détours vers l’Angleterre des années 2000. De la came de première bourre donc, tant pour les vieux loubards nostalgiques que pour les diggers de nouveautés. It’s only rock’n’roll, certes, mais c’est déjà beaucoup !

La Flemme – La Flemme

Il y a eu le Droit à la Paresse de Paul Lafargue, l’Éloge de l’Oisiveté de Bertrand Russell, l’Apologie des Oisifs de Robert Louis Stevenson, il y aura désormais La Flemme de La Flemme, premier EP dégainé par le quatuor marseillais en mars dernier. 4 titres torpillés en 11 minutes où l’on oscille (et on oh sees parfois) entre garage fiévreux et punk rock insolent, où les refrains sont aussi entêtants que les lyrics ne sont fédératrices. De la fougue rock’n’rollesque dans sa plus pure expression, expédiée dans une prose en V.O. réjouissante, qui laissent augurer du meilleur pour ce premier album à venir en 2025. Qu’on se le tienne pour dit, le gang phocéen balance là un cocktail Oblomov à même de raviver la flemme du rock !

Sex Shop Mushrooms – God Doesn’t Exist

Avril 1994. Le camarade Kurt se fait péter le caisson de l’autre côte de l’Atlantique, mettant fin à une des dernières grandes aventures rock du millénaire. 30 ans après, à Paris comme ailleurs, la moisissure grunge se propage à nouveau dans les caves. Toute une nouvelle génération de zicos s’attelle à ressusciter quelques fantômes à cheveux gras. Sex Shop Mushrooms en est un de ces meilleurs émissaires. Avec God Doesn’t Exist, premier album paru début octobre, le combo parisien livre une œuvre hantée, rageuse, regorgeant de classiques instantanés. Un fracas d’influences jamais passéistes, résolument prêtes à écrire un nouveau chapitre de cette histoire. Alors, come as you are my friend, le new grunge est dans la place.

Jim Ballon – Sensations

Considéré comme le meilleur groupe de France par ses collègues tourangeaux de Stuffed Foxes, Jim Ballon s’attelle à prouver le propos à travers un des albums les plus passionnants de 2024. Sensations est une expérience rare, une odyssée auditive effectivement des plus sensorielles. De « Je fixe sur ce truc si précisément » à « L’eau qui me traverse », tous les chemins mènent ici à la transe, qu’ils soient ambient, rock psyché, hip-hop ou électro. Quatre titres sur cinq y dépassent les 8 minutes ; condition sine qua non pour tutoyer les hauteurs cosmiques d’un Spacemen 3. Le psychédélisme ou le plus beau rappel de l’urgence de prendre son temps.

Smoking Pistols – Raw Troubles

Aaah le XXIème siècle et ses pandémies ! Le COVID ? Non. Le post-punk ! Ce terme systématiquement accolé, depuis le mi-temps des années 2010, devant n’importe quel blaze de groupe émergent. L’histoire avait pourtant bien démarré de l’autre côté de la Manche avec ce revival post-Brexit aussi excitant que salvateur (Shame, Squid, Yard Act, Fontaines DC) avant d’être perpétuée, en Angleterre comme en France, par une horde de fades imitateurs … jusqu’à l’overdose. Alors, Smoking Pistols, énièmes rejetons de cette mouvance ? Non ! Car les drômois possèdent ce qu’il manque à tant de leurs confrères : des hits ! Et Raw Troubles en regorge à foison. Power goes , Street Warfare, D Generation, Find a Cure, Cooking Rice sont quelques uns des titres qui risquent de vous hanter dès la première écoute et qui, sans sourciller, s’accapareront leur place dans les meilleures playlists consacrées au genre. Un premier LP impressionnant de maîtrise, ici pour démontrer que « post-punk » n’est pas qu’une étiquette à la mode à arborer mais bel et bien un héritage à porter, une manière viscérale d’envisager la musique.

UnCut – Space Cowboys

Space Cowboys. Un second album en forme de western cosmique. Un heavy blues qui aurait forcé sur la chique et le bourbon. Ennio Morricone s’il avait viré hardos. Aerosmith qui aurait bouffé Clutch. Du riff dégainé à la volée comme autant de bastos dans une rixe de saloon. Avec de grosses rasades de blues psyché supplément stoner. De Ganimede à Asteroid City, la bande-son des hors-la-loi célestes.

Bryan’s Magic Tears – Smoke & Mirrors

On y déambule comme dans un labyrinthe nineties vaporeux, on y arpente les endroits les plus embrumés de cette décennie-là, de l’Hacienda au cerveau d’Anton Newcombe. Les spectres croisés au cours de cette errance ne sont rien de moins que les gardiens du temple : Shaun Ryder, John Squire, les frangins Reid ou encore Kevin Shields. Paru en novembre chez Born Bad Records, le quatrième album du combo parisien est un véritable travail d’artisanat où chaque titre semble taillé pour rivaliser avec les gemmes des génies sus-cités. Nul doute, qu’à l’époque, ce Smoke & Mirrors aurait pu bousculer deux, trois panthéons bien établis. Dommage pour les nineties, tant mieux pour nous ; nous voilà contemporains d’une belle bande de prodiges.

Dead Chic – Serenades & Damnation

Et si on concluait ce Rockalendrier de l’Avent avec l’absolute banger de 2024 ? Ce Serenades & Damnation qui ne fait que confirmer tout le bien que l’on pensait déjà de Dead Chic depuis leur précédent EP The Venus Ballroom. Un disque hanté, à la fois, de références classieuses (Ennio Morricone et Tom Waits en tête), d’inspiration, de talents et par la voix d’Andy Balcon, véritable trésor de la scène rock actuelle. Il se dégage de chacun de ces onze titres une puissance cinématographique rare, à te rendre culte chaque scène de film qui aurait la bonne idée de les choisir comme soundtrack. Chevauchées à travers les grandes plaines américaines (Fortune ou Paris), ballades mélancoliques sous la pluie anglaise (Manchester), duo rock anatolien avec la chanteuse turque Tuğçe Şenoğul(Mirage), refrains façon classiques instantanés (Know Your Worth ou All Seasons Change), incursions heavy flamenco (¿Cuanto cuesta?) ; la masterclass est totale, le feu sacré brûlant du début à la fin de l’album. Dithyrambique, nous ? Si peu. Mais damnation assurée pour celles et ceux qui passeront à côté de ces onze sérénades.

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